« La PNL permet de choisir son attitude, non d’influencer le psychisme de l’autre »

FACE_newsLa Programmation Neuro-Linguistique permet de faire de son comportement une force. Décryptage de deux experts, auteurs du livre « Manager avec la PNL ». Dans « Manager avec la PNL », Didier Boudineau et Nicole Catona présentent les outils de la Programmation Neuro-Linguistique permettant d’améliorer son savoir-être. Se servir de ses émotions, remettre en cause un objectif déjà négocié, discuter les choix de son supérieur sans qu’il le prenne mal, arbitrer un conflit… A l’heure où qualité relationnelle et force de conviction apparaissent comme les premières vertus du manager, la PNL fait de plus en plus d’émules. Lors d’un chat avec les lecteurs du Journal du Management, Didier Boudineau et Nicole Catona ont répondu à une vingtaine de questions.

Pourquoi la programmation neurolinguistique s’appelle-t-elle comme ça ? En particulier, pourquoi ce terme de « programmation » ! (Qui fait un peu robotique…)
Didier Boudineau et Nicole Catona. Oui, c’est en effet la première impression ! Le mot « programmation » veut dire que, dans notre cerveau, se mettent en place des séquences qui vous permettent d’agir sans que vous ayez besoin de réfléchir. Par exemple, quand vous conduisez votre voiture, vous enchaînez les gestes de manière souvent automatique (et tant mieux… il serait beaucoup trop compliqué de penser à tout). Concernant la suite du sigle PNL : « neuro » veut dire que cela passe en effet par notre cerveau et par le système nerveux. « Linguistique », enfin, parce que le langage est un support important de la communication.

Que veut dire « se servir de ses émotions » ?
Le mot émotion, sans vouloir être trop savant, vient de « ex movere » : sortir, se mettre en mouvement. Les émotions sont l’énergie qui nous fait agir. Elles nous donnent aussi des messages sur ce qui se passe entre nous et notre environnement (dont les autres font partie). Il y a des émotions qui sont très utiles dans certains cadres. Par exemple, devant un projet, la curiosité, l’enthousiasme, etc. peuvent être très moteur. D’autres émotions, comme la colère ou la peur, peuvent être gênantes. Elles doivent être « managées » pour devenir utiles.

« Un reproche doit être fait sur des éléments observables, pas sur ses propres critères »

Quelle est l’origine de la PNL en entreprise ?
C’est à partir de l’observation de personnes particulièrement performantes dans leur communication que ce modèle a été élaboré, puis élargi au monde de l’entreprise. Au départ, il était plutôt orienté vers le développement de la personne.

Comment avez-vous appris la PNL ?
En suivant des cursus de formation. Les premiers avaient lieu aux USA et sont arrivés en Europe vers les années 80.

Y a-t-il beaucoup de pratiquants en entreprise ?
J’espère ! Mais nous ne savons pas vraiment combien de personnes pratiquent la PNL. Notre livre a cet objectif de développer cette connaissance. Mais en réalité, tout le monde, et même les managers, font de la PNL sans le savoir.

On parle beaucoup d’intelligence émotionnelle… n’est-ce pas surtout une façon pour le patron de manipuler ses subordonnés ? Est-ce une si bonne chose que les managers acquièrent des connaissances en psychologie ? Cela ne provoque-t-il pas des dérives ?
Oui, le risque existe : tout comme un élève d’auto école peut se servir de ce qu’il a appris comme un chauffard et pas de manière éthique. Cependant, plus il y a de gens qui savent conduire et plus ils peuvent se prémunir contre ces chauffards. C’est la même chose avec la PNL. De plus, si la PNL traduit en effet notre fonctionnement mental et psychologique, elle permet avant tout de choisir sa propre attitude – ou communication – , plus que d’influencer le psychisme de l’autre.

La PNL, c’est un peu de la psychologie au quotidien… je n’ai pas l’impression qu’on soit tous capables de l’appliquer. Si ?
Si, si ! La PNL est en quelque sorte la grammaire dont nous disposons tous pour communiquer. Ce que nous avons besoin d’apprendre (et effectivement il faut pratiquer et s’exercer), c’est quelle règle de communication appliquer lorsque c’est nécessaire. Tout comme écrire un texte en français demande quelquefois de retourner aux règles de grammaire pour que ce texte nous convienne.

Comment s’initier à la PNL ?
Il existe de nombreux centres de formation. L’important étant de choisir des enseignants de qualité (en termes de connaissances et surtout d’éthique). En France, une association – INLPTA – définit des standards rigoureux, auxquels doivent répondre les formateurs et les cursus : c’est une certaine garantie de qualité.

Quand on est en recherche de mieux-être, de savoir-être, on est en état de vulnérabilité. Un terrain de manipulation existe. Comment savoir si quelqu’un qui se dit « certifié en PNL » est sérieux et digne de confiance ? N’y a-t-il pas le même problème qu’avec les psychothérapeutes, que n’importe qui peut prétendre être ?
C’est vrai qu’un terrain de manipulation peut exister : la personne qui souhaite se faire aider dans cette recherche de mieux-être doit oser poser des questions. Quelle est la formation du formateur ou du psychothérapeute? Quelle est la méthode utilisée ? Quel est le cadre de la formation (ou de la thérapie) ? On peut aussi demander à quelles instances reconnues la personne est rattachée : un formateur ou un thérapeute « honnête » n’hésitera pas à vous donner toutes ces informations. De plus, il faut faire confiance à votre propre ressenti : si quelque chose vous semble trouble ou gênant, il faut que vous puissiez en parler. Et éventuellement ne pas hésiter à interrompre la formation.

Pouvez-vous nous expliquer les fondamentaux de la PNL dans la gestion et la motivation des équipes ?
Ces fondamentaux reposent essentiellement sur les présupposés de base de la PNL : chacun a un modèle du monde unique, la carte n’est pas le territoire. Ceci veut dire que considérer que l’on a en face de soi une personne et pas un objet est déjà très important, car chacun a besoin d’être reconnu. La PNL offre aussi des outils comme la stratégie d’objectif et l’échelle de Dilts, qui sont particulièrement utiles pour motiver les équipes. C’est une question très large et dans notre livre nous développons assez précisément ces aspects, qui sont en effet très importants pour tout manager.

« Si la communication reste au niveau de l’utilisation des outils, la communication n’est pas vraiment là »

Je voudrais vous soumettre un cas concret : comment m’y prendre pour faire un reproche à un collaborateur (éventuellement mon supérieur) sans qu’il le prenne mal ?
Qu’il le prenne bien ou mal ne dépend pas vraiment de vous mais de sa propre gestion émotionnelle. Un reproche doit être fait sur des éléments observables et pas sur les intentions ou les critères de la personne (cf. l’échelle de Dilts). Par exemple en disant « vous ne me rendez pas des rapports dans le temps voulu », et non « vous n’êtes pas assez impliqué dans votre travail ».

Qu’est-ce que la PNL recommande pour mettre en place un climat de confiance (par le regard, la posture, le langage…) ?
C’est l’ensemble de ce que l’on appelle « les outils du rapport ». Leur objectif est essentiellement de manifester à l’autre que l’on reconnaît son modèle du monde. Un exemple d’utilisation de la posture : lorsque vous rencontrez quelqu’un dans une réunion qui est assis et avec lequel vous souhaitez échanger, commencez par vous asseoir. Un autre exemple : si votre interlocuteur vous dit, à propos d’un projet, « je ne vois pas ce que vous voulez dire », montrez lui littéralement, par des gestes, des schémas, ce que vous souhaitez lui expliquer (il existe des spécificités de langage dans les registres sensoriels : visuel, auditif ou reliés aux émotions ou sentiments).

Quelles applications a la PNL pour la vente, la négociation…?
L’art de la vente et de la négociation consiste à rechercher ce qui est important pour l’autre (attention de garder l’éthique présente à l’esprit) : une vente est une bonne vente lorsqu’elle remplit des critères importants pour l’acheteur. La PNL permet de faire le point sur ces critères (il est inutile de vanter les performances technique d’une voiture à quelqu’un qui veut d’abord une belle voiture). La négociation devra aussi tenir compte des critères en jeu et trouver à ce niveau des solutions communes.

Quand vous parlez en entreprise ou a un manager de PNL pour la première fois, quelles réactions remarquez-vous ?
Les premières réactions sont souvent de la perplexité et même une certaine méfiance. Mais lorsque ce modèle est expliqué et qu’on en mesure l’efficacité, on obtient en général l’adhésion au modèle.

Comment peut-on mesurer l’efficacité de la PNL ? Par ailleurs, est-ce qu’il existe des méthodes concurrentes ?
Toute communication doit avoir un objectif : c’est donc le résultat et le feed-back qui permettent de « mesurer » l’efficacité avec toutes les nuances attachées à ce type d’outil. Je dirais qu’il n’y a pas de méthode concurrente, mais des méthodes complémentaires. Aucune méthode (y compris la PNL) ne peut prétendre répondre à toutes les situations : les méthodes les plus connues dans le domaine relationnel sont l’analyse transactionnelle, la gestalt etc.

Entre mieux communiquer et faire gober un message, la frontière est mince. Et au moment de le faire, nous ne nous posons peut-être pas la question de savoir si notre démarche est tout à fait éthique. Qu’en pensez-vous ?
J’en pense que cela nous incite en effet à prendre la mesure de notre responsabilité : ce qui fait la différence, c’est réellement notre intention. Etre au clair avec celle-ci est un préalable, qui peut nous aider à ne pas franchir cette frontière… qui est mince, comme vous le dites.

« Un manager doit savoir évaluer les comportements et les compétences, mais en respectant l’identité de ses collaborateurs »

Comment repérer une personne qui emploie la PNL ?
La PNL, bien intégrée, conduit à un savoir-être et à une qualité de communication. Une personne qui reformule bien ce que vous dites, qui vous aide à définir clairement un objectif, qui est dans une écoute active, soutient très probablement sa communication par des outils PNL. L’important est que vous sentiez que c’est éthique pour vous.

Peut-on résister à l’influence de la PNL ?
Si, en effet, la PNL est un outil qui permet d’influencer efficacement, il nous appartient toujours de choisir d’être influencé ou non. Aucun outil, aussi efficace soit-il, ne peut nous obliger à communiquer, à être influencé.

Comment cela se passe-t-il entre deux personnes qui utilisent simultanément et réciproquement la PNL ?
Bien ! Nous ajouterons seulement que le savoir-être est plus important que le savoir-faire. Mais si la communication reste au niveau de l’utilisation des outils, alors la communication n’est pas vraiment là…

La PNL, l’intelligence émotionnelle et toutes ces notions donnent l’impression que l’on va pouvoir faire passer un travail mal fait en l’enrobant dans de jolies phrases. Ne faudrait-il pas plutôt essayer d’être plus professionnels ?
Les phrases peuvent être aussi jolies que possible, si elles ne sont pas soutenues par un respect de l’autre, elles ne seront très vite qu’un enrobage bientôt dissous d’une pilule amère. Etre professionnel, c’est être rigoureux et performant, reconnaître les forces et les faiblesses sans toucher l’identité de l’autre. Un manager doit savoir évaluer les comportements et les compétences, sans concessions, mais en respectant les valeurs et l’identité de ses collaborateurs. Donc on n’enrobe rien du tout.

A part dans les entreprises, où la PNL peut-elle servir ? Dans quels contextes ? Et comment ?
Partout ! Dans toute situation où la communication interpersonnelle existe. Par exemple dans la vie familiale, mais aussi dans le domaine de la psychothérapie. Son application demande une pratique, des connaissances et une vraie volonté de communiquer.

Avec la PNL, est-ce que je peux motiver mon patron à me donner une augmentation ?
Rires !!!!! La PNL va vous donner beaucoup d’atouts pour mener la négociation. Mais n’oublions pas que la décision finale appartient au patron. La PNL permet simplement de développer des arguments percutants. Et en particulier, la qualité de la relation qui est établie avec le patron est une bonne opportunité de se faire entendre.

Parcours
Didier Boudineau a été directeur général de filiales de groupes français et étrangers pendant plus de vingt ans. Praticien en PNL, il est aujourd’hui manager de transition et enseignant en marketing et stratégie dans plusieurs écoles de commerce et d’ingénieurs. Sur la base des outils PNL, il aide les étudiants à définir leur projet professionnel et monte également des formations intra-entreprises sur le people management.
Nicole Catona est pharmacienne biologiste et psychothérapeute. Enseignante certifiée en PNL, formée aux Etats-Unis, en Belgique et en France, elle enseigne ce modèle au niveau international. Elle s’attache à développer dans l’entreprise ce qui peut donner à ses acteurs la possibilité de trouver dans leur travail de quoi remplir leurs aspirations.

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