Slow Management

 

747553-aller-au-devant-des-autresRetrouver le sens de l’humain et de la rencontre avec l’autre. Tel est le credo du « slow management », comme nous l’explique Loïck Roche, directeur adjoint de Grenoble Ecole de Management, et co auteur avec Dominique Steiler et John Sadowsky du livre « Le slow management, éloge du bien-être’ » paru aux Presses Universitaires de Grenoble.

Comment définissez-vous le slow management ?

Le slow management suggère de reprendre le management dans ce qu’il a de plus noble, mais aussi de plus difficile : aller à la rencontre des autres. Il trouve son origine dans les mouvements managériaux nés aux États-Unis dans la première moitié du XXe siècle. A cette époque déjà, des managers avaient compris que la meilleure façon de diriger les hommes et les femmes, c’était de susciter les rencontres. Ce mode de management a été popularisé par les fondateurs de Hewlett-Packard qui appelait cela le « management by walking around », traduisez le « management en marchant ». Cette méthode a ensuite été abandonnée, pour être remise au goût du jour dans les années 70 par le mythique patron de General Electric, Jack Welch. Celui-ci disait que le manager avait aussi une vocation à enseigner, exactement comme un professeur dans une salle de classe qui va à la rencontre des autres pour exposer son savoir, convaincre, mais aussi pour écouter et modifier sa pensée car lorsque l’on enseigne, on se nourrit des échanges avec les étudiants.

Comment expliquez-vous la résurgence de ce concept aujourd’hui ?

D’abord parce qu’il y a un échec patent du management par objectif qui ne vise que la performance à tout crin. On a oublié que pour obtenir cette performance, il fallait d’abord s’occuper du bien-être des salariés. Attention, il ne s’agit pas de les cocooner… La pression est nécessaire, elle est même normale, mais pour manager ses collaborateurs, il faut donner du sens à leur travail et de la reconnaissance.
La seconde raison qui explique ce retour du slow management, c’est qu’il constitue une réponse aux crises successives survenues ces dernières années, des crises qui ont placé les managers dans des situations impossibles. Comme tout être humain, dans ce genre de contexte, on a peur de ne pas savoir faire. Alors plutôt que d’aller au contact des autres, on a tendance à se réfugier dans son bureau. Ce faisant, on perd tout contact avec la réalité et lorsque le contact intervient, les réactions de peur font que l’on peut se montrer violent, disqualifiant ou humiliant.

Quels sont les leviers à activer pour se comporter en « slow manager » ?

Commencer par accepter de se dire que le temps est un matériau hautement compressible, et que l’on peut faire beaucoup de choses, même lorsque celui-ci est compté. Il faut ensuite que les managers apprennent à se réserver des plages de temps dans leurs agendas pour aller à la rencontre de leurs équipes. Cette seule démarche contribuera à les rassurer car elle leur montrera qu’il y a un pilote dans l’avion avec qui il est possible d’échanger. Évidemment, dans les grandes organisations, le dirigeant doit montrer l’exemple et la démarche doit être démultipliée à tous les niveaux hiérarchiques afin que tous les managers adoptent le slow management.

Quels sont les limites du système ?

Lorsque vous présentez le slow management à des managers, ils sont tous d’accord pour adhérer au concept, qui est plein de bon sens. Mais après, lorsqu’il faut le mettre en œuvre, c’est une autre histoire car aller à la rencontre des autres, c’est s’exposer. Quand vous dialoguez avec quelqu’un, tout peut arriver. Vous n’êtes plus derrière votre bureau en train de communiquer par mail ou par téléphone. Aller à la rencontre de l’autre, c’est reconnaître que celui qui est en face de vous est aussi un homme debout, qu’il peut vous répondre, éventuellement exprimer des désaccords… La transition vers le slow management prendra donc du temps, mais un grand mouvement de fond est en train de se lever dans les entreprises. Tout le monde a aujourd’hui conscience qu’il faut retrouver un peu d’humanité et revenir aux fondamentaux du management : ce sont bien les hommes et les femmes qui constituent le moteur le plus important des organisations.

Yves Rivoal

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